Epargne villageoise : une approche indispensable à l'accompagnement des acteurs ruraux

17 juin 2020

Au nombre des problèmes que relèvent les acteurs du milieu rural, se retrouve celui d’accès au financement. Même si de nombreuses banques et institutions de micro-finance  offrent de précieux services aux populations pauvres du monde en développement, c’est surtout dans les zones urbaines ou périurbaines dynamiques que leur réussite est évidente. Cependant, plusieurs décennies  après le début de la révolution de la micro-finance, dans de nombreuses zones rurales, les populations, notamment celles qui sont très pauvres et donc ont un revenu assez irrégulière et une éducation financière presque inexistante, ont toujours du mal à accéder à des produits de micro-finance appropriés. Afin de palier à ce déficit, le système AVEC ( Association Villageoise d'Epargne et de Crédit) a été introduit dans l'accompagnement des acteurs ruraux.
A ce jour, ce système est répandu dans plusieurs milieux ruraux d'Afrique, modelé selon chaque contexte. 
L’AVEC est un système basé dans la communauté qui rassemble des acteurs ayant idéalement les mêmes activités (producteurs, transformatrices, commerçants, etc.) et qui n’ont pas forcément un flux de revenus régulier. Elle leur permet d’épargner afin de bénéficier des prêts à investir dans leurs activités. Cela peut sembler étonnant que les personnes en situation d’extrême pauvreté puissent être capables d’épargner, mais le fait est que même les plus démunis économisent pour des évènements futurs prévus ou non prévus. L’AVEC, elle, n’a pas un fonctionnement rotatif. Elle a à sa tête un bureau valable une année et est régie par un règlement intérieur élaboré par ses membres et se déroule sur un cycle de 9 à 12 mois. Lors de chaque réunion (fréquence définie par les acteurs), les membres (généralement 10 à 20) versent leur cotisation à la caisse de solidarité, achètent des parts (épargne). A partir du troisième  mois, l’AVEC permet aux membres qui en font la demande de souscrire un crédit avec intérêt (généralement 10% par mois sur 3 à 4 mois) d’un montant maximum trois fois supérieur à l’épargne totale du débiteur. A la fin de chaque cycle, tous les crédits sont remboursés, et toutes les épargnes et bénéfices sont distribués aux membres au prorata des parts épargnées.

Quels principes de fonctionnement ?

Epargne : Cette approche porte sur l’épargne, et non le crédit. Les membres se réunissent idéalement une fois par semaine et mettent leur argent dans une caisse commune. L’épargne individuelle mise en commun dans une caisse peut être retirée à tout moment pour un achat ou un investissement mais fonctionne aussi comme une assurance ou une protection pour les moments difficiles. Cette restriction est souvent convenue pour éviter les emprunts trop élevés par rapport aux capacités individuelles de remboursement, mais également pour encourager l’épargne. 

Conditions flexibles :  Les conditions de remboursement des taux d’intérêt et des emprunts sont négociées au sein même des groupes. La pression exercée par les pairs contribue à des taux de remboursement satisfaisants tandis que la solidarité au sein du groupe garantit un certain degré de flexibilité vis-à-vis du remboursement, dans le cas où un membre se retrouve en situation de crise.

Transparence : Toutes les transactions se font devant tous les membres au cours des réunions hebdomadaires empêchant ainsi toute gestion extérieure visant le détournement de fonds. Trois personnes détiennent chacune des trois  clés qui ferment la caisse et une quatrième  garde la caisse jusqu’à la prochaine réunion. Chaque membre dispose d’un carnet pour suivre l’évolution de ses transactions (épargne, prêt, remboursement, sanction) Les sommes à verser sont fixées au début du cycle et ne changent pas jusqu’à la fin de chaque cycle. Ces procédures garantissent donc une transparence totale.

Auto-gestion / éducation financière : L’une des caractéristiques les plus novatrices de ces associations est qu’elles sont entièrement gérées par leurs membres. Chaque centime épargné ou gagné par le groupe est généré par les membres eux-mêmes. L'appartenance à une telle association d'épargne leur imprime une certaine rigueur financière et augmente leur crédibilité au niveau des institutions de micro-finance. 

Lorsqu’elles sont mises en place de façon adéquate, les AVEC créent un espace sécurisé au sein duquel les membres peuvent épargner, accéder au crédit, bénéficier d’un soutien quand ils sont confrontés à des situations d’urgence personnelle, et bâtir un réseau de soutien social. Elles servent aussi de tremplin de passage des messages de sensibilisation et favorisent surtout le partage d’expérience entre les membres.  Fières sommes-nous de constater l’impact de cette approche aussi bien sur le développement des activités des uns et des autres, que sur la cohésion sociale en zone rurale. Cet outil, bien installé et bien suivi, constitue un levier du mieux-vivre au village.

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